Le Dictionnaire (4) imprimé sur papier « bible » compte environ 1200 pages, Textes en corps 9 (?), une ou deux colonnes par page, donc une masse considérable d’informations. Compte tenu de l’ampleur du sujet on peut estimer que c’est peu ou beaucoup. La formule adoptée est un choix. L’avenir dira si c’était le meilleur possible. En tout état de cause, cet ouvrage « bloque », sans doute à jamais, toute nouvelle perspective d’une histoire globale de la Résistance Française. C’est là une bien lourde responsabilité.

L’ouvrage comprend 4 grands chapitres, chacun associant une vue d’ensemble et des pages de « dictionnaire » :

- Regards sur la Résistance et la France Libre
- Acteurs et territoires
- Évènements et actions
- Les résistants. Leur temps et le nôtre.

C’est un choix éditorial, respectable comme tout choix, mais nous avons tendance à penser que l’histoire de la Résistance n’est pas un gâteau (ou un camembert) que l’on découpe au gré des opportunités, mais un ensemble de faits qui ne sont compré-hensibles que dans leur ordre chronologique et leur contexte géographique, économique, sociologique. Nous avions en d’autres temps, spécialement, à l’occasion des grands colloques de l’IHTP, parlé d’une tendance au « saucissonnage » par thème et regretté que l’histoire nationale de la Résistance française soit trop souvent le fruit d’une volonté de faire entrer ses diversités dans une globalité centralisatrice bien française, en ignorant les spécificités sectorielles.. Nous persistons aussi à considérer que la recherche historique est un constant rappel à l’humilité, constat d’évidence bien peu partagé.

Peut-être ne sommes-nous pas les mieux placés pour présenter une analyse critique de l’ouvrage. Nous avons assisté aux grands colloques de l’IHTP (et parfois exprimé des réserves.) Nous avons écouté avec attention les communications des intervenants, lesquelles se retrouvent pour partie dans leurs ouvrages et maintenant dans le Dictionnaire. Les différences d’appréciation viennent de notre qualité d’acteurs et des difficultés qu’ont les historiens à imaginer notre vécu. Certains essaient de nous comprendre, voire s’intéressent à nos travaux, nous témoignent leur sympathie. D’autres nous prennent pour des « rigolos » ou des « fossiles », et nous toisent du haut de leur condescendance.

La brève (et incomplète) présentation ci-après va respecter l’ordre des chapitres en mettant en relief ce qui concerne la Creuse (rien ou presque) et le Limousin, (bien peu de choses). D’abord, deux observations préliminaires :

- Le Dictionnaire de la Résistance commence par une chronologie qui débute le 10 mai 1940, ce qui signifie qu’il ignore les causes et les origines de la guerre, sans lesquelles il n’y aurait pas eu la défaite, l’armistice et l’occupation, dont la Résistance n’est que la conséquence. Même omission pour le vote du 10 juillet qui mit fin à la République et permit la création de l’Etat Français. Les historiens universitaires évoquent, souvent à juste titre, « le temps long. » En la circonstance il font l’impasse sur la période de l’entre deux guerres en France, en Allemagne et en Europe. Pourquoi ? Il n’est jamais d’effets sans cause et de causes sans responsabilités. La position adoptée permet d’exonérer de leur inconscience et de leur incompétence ceux qui ont conduit la France (victorieuse en 1918) au désastre.

- L’ouvrage comporte différentes cartes géographiques, inclus celle distinguant les « régions », A, B, C, D, M, et P pour la zone Nord (mais pas les sous-régions), R.1, R.2, R.3, R.4, R.5 et R.6 pour la zone sud, lesquelles correspondaient alors aux « régions administratives » de Vichy et aux EMP des services d’occupation allemands (MBF.) Vouloir faire coïncider ces régions avec les régions actuelles, relève au mieux de l’inconscience, au pire … (à chacun de choisir son adjectif.) L’histoire a vocation à rendre compte de ce qui a existé, pas d’en « fabriquer » une nouvelle version, au gré d’une vision personnelle ou d’opportunités de circonstance.

LA CHRONOLOGIE (sur deux colonnes) distingue d’une part le contexte national et mondial, de l’autre la Résistance nationale et la France Libre. On voit bien la facilité typographique, mais un répertoire sur 4 colonnes : Contexte international, France Libre, Vichy, Résistance. (6) A défaut l’utilisation de caractères différents ou simplement de l’italique et du gras aurait rendu le tableau plus « lisible. »

La chronologie de l’après 10 mai 40, ignore la débâcle qui précipita sur les routes 6 à 8 millions de réfugiés, hommes, femmes, enfants, vieillards et les restes d’une armée en déroute. Ce fut pourtant un drame hors du commun. Et il y eut ultérieurement ceux qui ne furent pas autorisés à repartir. Les bombardements et mitraillages du 19 juin postérieurs à la demande d’armistice : dans l’Allier, l’Indre, la Creuse, la Haute Vienne, etc., spécialement l’attaque des colonnes réfugiés, qui firent des centaines de victimes innocentes, n’ont pas davantage droit à mention.

Des lois d’exception de 1940 et des lois organiques de Vichy qui installent la Révolution nationale, sans oublier la Légion et les textes concernant l’école, il n’est guère de traces. En 1941, « les accords de Paris », le second statut des Juifs et les textes complémentaires, la création des sections spéciales, les prestations de serment, spécialement celles des magistrats le 1er septembre, ne figurent pas davantage dans cette chronologie. Les conditions de vie des Français ? Selon la zone et les conditions particulières à chacune, selon l’environnement économique ? Apparemment sans intérêt. Nos éminents historiens n’ont d’évidence pas connu la faim et les contraintes de l’occupation.

Dans la phase finale de cette chronologie, mêmes approximations : Le 7 juin 1944 « Les FFI investissent Tulle » Non ! Les FTP seulement. Simple erreur ? Le 8 « les FFI libèrent Nantua et Oyonnax. » Le 9 « pendaisons à Tulle par une colonne de la division Das Reich. » Le 16 août : « Libération de Brive. » Le 21 août « les FFI de Guingouin libèrent Limoges. » Le 25 août : « la 2ème DB de Leclerc et la 4ème DI américaine libèrent Paris. » Les opérations et les exactions du Gpt Brehmer en R. 5 ? Inconnues ? A Guéret et en Creuse, ni le 7 juin, ni dans les jours suivants, il ne s’est rien passé !!!


1 – INTRODUCTION. REGARDS SUR LA RESISTANCE ET LA FRANCE LIBRE.

Elle ne comporte pas moins de 50 pages présentant 5 chapitres sous 6 signatures :
- Les grandes étapes de la Résistance
- La France Libre, la Résistance et la France
- Systèmes d’occupations et pouvoirs
- Qu’est-ce que la Résistance ?
- Les résistants dans leur temps.

A chacun son appréciation mais il est sans doute, parmi les derniers survivants, des résistants qui auront des difficultés à retrouver leur vécu. A trop vouloir généraliser on risque l’erreur et à trop vouloir prendre de distance et de hauteur on risque le flou. Il est aussi des découvertes qui nous laissent perplexes : « Mao théorise la guerre révolutionnaire dès avant la seconde guerre mondiale et après 1945 les luttes de libération nationale des peuples colonisés sont d’inspiration marxiste ou populiste. »
Ou encore : « La crise de 1968 voit également surgir une nouvelle résistance populaire qui s’inspire de la Résistance Française et du maoïsme réunis… » Sauf erreur – mais nous sommes si vieux – il nous semble avoir combattu pour la Liberté, pas pour la Révolution. Aurions-nous été maoïste sans le savoir ? Et en 1968, nous n’avons pas davantage reconnu, dans la grande pagaïe du moment, notre Résistance à l’occupant. Sauf erreur encore, tout a commencé en mars par la revendication de l’étudiant Cohn-Bendit exigeant, pour son université, le libre accès des garçons aux dortoirs des filles (présumées consentantes.) Même le programme du CNR, jugé par certains comme « très avancé » n’allait pas jusque là !!! Ce n’est que plus tard qu’apparut la fameuse formule : « Il est interdit d’interdire. » Beaucoup plus facile à retenir que les bases de notre morale ou les règles élémentaires de notre grammaire.

Nous évoquons souvent les hommes et les structures. Dans la Résistance que nous avons vécue, ce sont les hommes qui ont transcendé les structures, se sont imposés par leur qualités propres, leur intelligence, leur courage, leur exemplarité, leur « charisme,» leurs capacités à être des « chefs » dans l’action. Souvent, des groupes de sympathisants ne se sont engagés qu’après avoir trouvé « leur » chef. Nous parlons évidemment des combattants, de ceux qui ont agi, risqué leur vie, pas des parleurs et conseilleurs, en général plus occupés à leurs ambitions ou leurs prébendes d’après libération qu’à la libération elle même. Les chefs de la Résis-tance, les « vrais », les « purs », furent presque toujours des hommes nouveaux qui n’avaient pas été compromis dans le système précédent et rejetaient, comme leurs jeunes troupes « les politiques qui nous ont mis dans…. » Curieusement nos historiens d’aujourd’hui ont bien des difficultés à imaginer cette situation.

PREMIÈRE PARTIE — ACTEURS ET TERRITOIRES.

Sur 37 pages, ce chapitre présente 5 sujets traités par 5 auteurs :
- La Résistance individuelle et collective
- Les liens entre des deux Résistances
- Géographie de la Résistance intérieure
- Géographie de la Résistance extérieure
- La Résistance et les Alliés.

Les anciens Résistants y trouveront ce qui leur a sans doute échappé dans leur propre vécu ? Le résistant de base n’a eu, en général, qu’une vision partielle ne dépassant guère le champ d’action de son unité, au mieux les limites de son département, exceptionnellement de sa région, quant il a entendu parler du DMR, des responsables des parachutages, voire du chef de la mission interalliée (Jedburgh), tous personnages mystérieux qui ont – ou sont supposés avoir – la possibilité de faire « pleuvoir » des armes tant attendues.

Cette première partie est suivie du Dictionnaire qui traite successivement, en 458 pages et 5 chapitres, des activités de la Résistance.

- Mouvements, réseaux et structures. (164 pages en 5 sous-chapitres) :
  - Repères,
  - Mouvements,
  - Réseaux
  - Organisations civiles et militaires de la Résistance intérieure..
  - Organisations civiles et militaires de la France Libre.

- Territoires et régions (82 pages) en 3 sous-chapitres :
  - Territoires de la Résistance
  - La Résistance dans les régions
  - Les territoires de la Résistance extérieure.

- Hommes et Femmes. (214 pages en 3 sous-chapitres) ?
  - Combien étaient-ils ?
  - Avertissement
  - Biographies.

Nous entrons ici au cœur de la Résistance. Chaque chapitre ou sous-chapitre présente en principe ses informations par ordre alphabétique mais il est parfois bien difficile de discerner dans quel chapitre se situe l’information recherchée. Quelle est la différence entre « les mouvements » et « les organisations civiles et militaires » ? A titre d’exemple, le premier sous-chapitre : « Repères », nous éclaire sur le BCRA que nous aurions normalement recherché dans « Les organisations civiles et militaires de la France Libre et les « réseaux » se trouvent entre les « partis politiques » et le SOE, lequel précède les « syndicats. » Il y a vraisemblablement dans ce découpage une raison qui nous échappe.

REPERES


Dans ce sous-chapitre», le BCRA occupe deux pages et demie. C’est bien peu pour synthétiser les trois ouvrages cités en référence. Beaucoup de considérations sur les personnes et leurs opinions politiques. Vu de France c’était parfois des voix entendues périodiquement sur les ondes de la BBC, un organisme qui attendait de nous des renseignements, qui nous déléguait des agents porteurs de directives, nous faisait espérer des armes (qui arrivèrent souvent bien tard) et, pour une minorité qui eut la chance de les approcher, un DMR, des responsables des opérations aériennes, des radios, des officiers instructeurs, plus tard une mission interalliée.

Le Conseil National de la Résistance précède, dans l’ordre alphabétique, la Délégation Générale qui lui donna vie. Dans la clandestinité, beaucoup de jeunes n’ont alors guère apprécié le retour des anciens politiques au sein du CNR. C’est l’histoire, beaucoup plus tard, qui nous a permis de comprendre la décision que Jean Moulin partage avec le général de Gaulle, pour des raisons de stratégie politique extérieure. Le premier pensait doute en conserver la maîtrise mais il fut hélas arrêté. S’il n’était pas mort, bien des choses auraient peut-être été différentes.

Les Partis politiques ont droit à une notice, rédigée par un historien à nos yeux lucide et courageux (chacun sait mais il ne faut pas dire) : « … les partis ont laissé le terrain du combat à la France Libre et aux mouvements clandestins. L’opinion, y compris résistante, leur impute les échecs de la III° République et la défaite. » … « Nombre d’hommes de gauche dont Jean Moulin partagent cette suspicion. Un socialiste comme Pierre Brossolette envisage la création d’un grand parti « gaulliste » rassemblant l’éventail des forces résistantes. Cette hostilité persistante sera l’un des fondements du gaullisme politique après la libération. » Seul, malgré ses errements de 39-40 (pacte germano-soviétique, désertion de Thorez, etc.) le parti communiste s’engage en tant que parti, d’abord contre Vichy puis contre l’occupant (après l’attaque de l’URSS par Hitler), créé le Front National puis les FTP. Il y eut sans doute des socialistes, des radicaux et des démocrates chrétiens dans la Résistance active, mais nous n’avons pas connaissance (hors peut-être cas particulier des groupes Veny) de maquis d’origine « politique », du CAS, du parti radical ou des démocrates-chrétiens.

Les jeunes, dans leur grande majorité, n’étaient pas politisés et ils ont souvent, au lendemain de la libération, signé un engagement volontaire pour la durée de la guerre. Les hommes des partis ont eux, investi les Comités de Libération (c’était moins dangereux) et phagocyté la Résistance. D’où cette fameuse phrase du chef des FFI de la R.5-D.2 ; ramenant en 1945 ses démobilisés : « Messieurs, vous dont j’ai vu naître et grandir les responsabilités et les honneurs … Souvenez-vous. »

Le SOE a droit, dans le sous-chapitre « REPERES » à une notice particulière. Elle est rédigée pat l’historien anglais Michael R.D. Foot, l’homme sans doute le plus qualifié pour traiter le sujet. Il fait mention des six sections qui couvrent la France, dont la section RF qui assure la liaison avec le BCRA, et la section « F » plus connue sous le nom de celui qui en fut le chef, le colonel Buckmaster. 1750 hommes et 50 femmes furent envoyés en France par le SOE. Il n’est pas fait mention des différentes missions qui opérèrent sur notre territoire mais en fonction d’ouvrages récents de diverses origines, nous distinguons désormais assez bien celles affectées à la R.5 et aux territoires voisins.

LES MOUVEMENTS.

Ce sous-chapitre en recense 28, inclus les « Mouvements Unis de Résistance » (MUR) issus du regroupement des trois principaux mouvements de zone Sud, le « Mouvement de Libération Nationale » associant aux MUR des mouvements de zone Nord et même « Libération Nationale » présenté comme ancêtre de Combat. La place accordée à chacun n’est pas toujours à la mesure de son importance. Nous avons fait état, récemment, de la modeste implantation des mouvements dans notre département au moins jusqu’à la création des MUR. A notre connaissance, les journaux clandestins n’eurent pas, l’importance qu’on leur accorde.

LES RESEAUX

Ils constituent un sujet complexe, bien difficile à maîtriser pour quiconque n’en a pas eu la pratique. Ce que soulignent les deux auteur(e)s : « les réseaux se caractérisent par leur complexité, leur implication, mais aussi par leur mobilité et leur adaptabilité. » Nous ajouterons leur technicité et leur danger. Certains demandaient parfois un haut niveau de compétence (cas des télécommunications, des sous-marins, de certains sites stratégiques, etc.) Il fallait aussi transmettre les informations et les radios ont payé un très lourd tribut. 24 réseaux seulement, inclus deux de Vichy, et d’autres relevant des britanniques, font l’objet d’une notice. Pourquoi ? En fonction de quels critères de sélection. En annexe le Dictionnaire publie une liste de 175 réseaux homologués par la France Combattante, mais sans distinction de leurs attributions (renseignements, action, etc.) Nous y trouvons Alliance mais pas Ajax.

ORGANISATION CIVILE ET MILITAIRE DE LA RESISTANCE INTERIEURE.

Il en est recensé 63 sur 57 pages. Problème : on y trouve apparemment tout ce que l’on n’a pas pu caser ailleurs, par ordre alphabétique évidemment, ce qui en complique encore l’approche. Nous avons, pour l’analyse distingué 7 groupes :
- Services militaires ou para-militaires : NAP + deux « services «  de Vichy.
- Organisations politiques et syndicales : CAS, PCF, Action ouvrière,
- Organisations caritatives civiles ou religieuses :  Cimade, OSE, Cosor, etc.
- Organisations militaires de l’intérieur : AS, SNM, CFL, FTP, FFI, COMAC, etc.
- Organisations militaires de la France Libre ; BOA, COPA, SOAM, SAP, DMR etc.
- Organismes de Vichy travaillant contre les allemands : CDM, TR, etc.
- Organisations d’origine étrangères : IS, italiennes, espagnoles, allemandes, etc.

Nous supposons nos lecteurs suffisamment avertis des abréviations pour en retrouver le sens.

Nous nous attacherons particulièrement aux organisations de la France Libre car elles désignent pour l’essentiel, sous des appellations successives et dans le désordre un même service : celui qui avait mission de nous fournir des armes. L’ouvrage cité en référence est bien, à notre connaissance, la source la plus complète et la plus fiable. Nous avons évoqué récemment ces structures successives pour le Creuse et la R.5. Très schématiquement, tout commence avec les trois officiers « en mission » placés par Jean Moulin auprès des trois principaux mouvements de zone sud, puis des régions, regroupées par deux. Le SOAM (Service des opérations aériennes et Maritimes) naît en novembre 1942, en zone sud, complété début de 1943, en zone Nord, par le BOA (Bureau des Opérations aériennes) . En avril, pour des raisons de sécurité le SOAM devient COPA (Centre d’Opérations et de Parachutages d’Atterrissages. En juin, à nouveau pour des raisons de sécurité (arrestation de Jean Moulin) le COPA devient SAP. (Section des Atterrissages et Parachutages) mais pour beaucoup d’acteurs, le service conservera le nom de COPA.

Pour nous « Kim » (Paul Schmidt) initialement affecté en 1942, par Jean Moulin, à « Libération » puis aux régions 5 et 6 quitte le secteur en mars 43, il est remplacé en avril par « Pair » (Groult de Beaufort.) « Laplace » (Deglise-Fabre) est envoyé en juillet à Londres pour être formé aux fonctions de responsable des opérations aériennes pour la R.5. Peu après son retour, il est arrêté fin octobre et avale sa pilule de cyanure. Son successeur, « Baron », (Gérard Hennebert) est parachuté à la mi-janvier, bientôt suivi par le DMR Ellipse, puis par deux officiers instructeurs (« Croc » et « Sécateur ») et deux radios (« Parthe » et « Ruthène. ») Baron sera arrêté à son tour en avril mais parviendra, avec son camarade « Croc » à s’évader de la voiture de a Gestapo qui le transporte. Lors de chaque arrestation, des adjoints ou assistants seront pris, condamnés, parfois déportés. Pour nos éminents historiens, ce ne sont là que des faits et des noms relevés dans un organigramme mais pour nous survivants il y a derrière chaque nom ou pseudo une silhouette, un visage, un sourire, le drame qui a emporté une vie. La Résistance ce fut pour nous en parodiant Churchill « du sang et des larmes. » C’est là une des raisons qui nous séparera toujours des visions trop intellectualisées de divers historiens mais aussi de celles et ceux pour qui la Résistance a d’abord été un tremplin. A ce jour, sauf erreur, il ne reste pour la R.5, le FFL « Sécateur », le responsable COPA Creuse, et un responsable COPA Haute Vienne.

- Les DMR : Là encore il est d’inévitables variantes en fonction de la personnalité de ceux qui assumèrent la fonction, de la date d’arrivée sur terrain, mais aussi des composantes de la Résistance dans la région à laquelle ils furent affectés. La première observation est évidente, la seconde dépend de l’accueil ou de l’absence d’accueil des formations FTP qui, en général, ne reconnaissaient pas l’autorité de ces responsables « gaullistes. » Quand elles étaient armées par le SOE, c’était souvent le cas, le DMR n’avait que peu de choses à leur apporter et elles préféraient dépendre du COMAC que de l’EM interallié (via Koenig et le DMR.) La fonction n’était pas de tout repos. Nos deux « voisins » (R.6 : Pyramide et B : Hypoténuse) connurent des fins tragiques.

Le Résistant de base, souvent au départ « réfractaire au STO » ayant rejoint un maquis et souvent participé à de multiples opérations à caractère militaire aura bien des difficultés à retrouver son parcours dans le Dictionnaire. Il se rappelle sans doute qu’il a été d’abord été hébergé dans les bois ou dans un village abandonné, parfois chez des paysans. Au début il a surtout été en charge de corvées de toutes sortes. Il n’y avait pour armes que quelques fusils de chasse, pistolets et/ou vieux fusils de récupération, et il a fallu attendre longtemps un premier parachutage dont il n’a rien vu car il avait été affecté à la garde des voies d’accès. Il ignore certainement qu’à cette époque il dépendait du « Service national Maquis », lequel est devenu début avril 44 «Les Corps Françs de la Libération » (CFL) avant de devenir fin mai, FFI.

Le Service National Maquis fait l’objet dans le Dictionnaire d’une notice d’une page de François Marcot. En fait, un condensé de sa communication au colloque de Besançon sur le thème « Lutte armée et Maquis. » Communication en apparence remarquable, fondée sur des documents d’archives, mais oubliant qu’entre le sommet et la base il y avait à l’époque divers échelons responsables dans leur secteur (région ou département), que la transmission pouvait connaître des aléas, que la Résistance ne fonctionnait pas comme une administration, que les décision-naires de base, ceux du terrain, avaient leurs priorités lesquelles ne « cadraient » pas toujours avec les options plus ou moins théoriques du sommet. Il y a là un nouveau point de divergences d’appréciation entre l’histoire vécue (relayée par les archives lorsqu’elles existent) et l’histoire savante. La remarque vaut aussi à un moindre degré pour les directives de Vichy, surtout dans la dernière période. Un gendarme qui ne veut pas comprendre, pas faire, par voir, pas entendre, est capable de trésors d’imagination pour justifier son attitude.

Nous ne retrouvons pas plus le Service Maquis de R.5 dans le condensé que dans la communication initiale publiée avec les actes du colloque, et les réserves exprimées à Beançon demeurent. Seule différence : en complément du vécu, nous avions alors dix ans de recherche collective ; nous sommes à vingt mais nous n’avons rien à changer à ce que nous écrivions alors, dont ci-après l’essentiel.

François Marcot distingue trois périodes :
- Mai-juillet 43 : Mise en place.
- Juillet-octobre : le Service Maquis tend à devenir autonome.
- Octobre 43-avril 44 : effacement du service Maquis.

Qu’en est-il en Creuse et en R.5 ?

Le « régional Maquis » est Pierrette (Gontrand Royer), de Brive, assisté par Claude Gérard. Claude sera arrêtée mais pas déportée. Pierrette sera arrêté à la mi-décembre 43 et déporté, mais reviendra. Il sera remplacé par Charlieu (Henrri Chas), qui sera ultérieurement arrêté et déporté mais ne reviendra pas. La fonction était délicate et dangereuse. En Creuse, est arrivé fin juillet ou début août le « départemental » Marcel (Fleiser.) C’est un sous-officier actif et courageux mais apparemment mal préparé à des fonctions qu’il découvre dans un département qu’il ne connaît pas. Il sera lui aussi arrêté et déporté début décembre et ne reviendra pas. Il est remplacé quelques jours plus tard par François (nommé par Pierrette à la veille de son arrestation) ; il est déjà en charge du NAP, fonction  occupée en relais du précédent titulaire, démissionnaire. (L’année 43 a été bien douloureuse en R.5)

Qu’en est-il des directives et autres circulaires nationales ? François est mort accidentellement en 1958 sans avoir pu écrire ses mémoires. Nous avons donc demandé au seul départemental Maquis survivant (décédé depuis) ce qu’il en était. La réponse a été fort édifiante : « A aucun moment je n’ai reçu d’ordre écrit. Dans les réunions on déterminait les compétences territoriales et on échangeait des expériences. « Nous pouvons ajouter : ce qui correspondait bien au style de Charlieu. Ce constat n’altère en rien la qualité de l’exposé de François Marcot. Il signifie seulement qu’entre l’échelon national et le terrain existaient des impératifs obligeant les « régionaux » à s‘adapter et les « départementaux » à se débrouiller avec leurs problèmes. C’était souvent çà la Résistance. Il faut aussi prendre en compte les tempéraments, les capacités, l’expérience, des hommes et les moyens affectés. Les décisions et arrangements au sommet, les stratégies savamment élaborées, devaient en permanence affronter les réalités de la région et du département. A quoi bon d’ailleurs pondre de belles circulaires et bâtir de savants plans d’action quand il n’y avait pas d’armes. Ou si peu. 

En Creuse quelles sont, fin décembre 43–début janvier 44, les préoccupations de François ? Bien peu stratégiques. Vraiment au ras des pâquerettes (pas encore fleuries). Prioritairement accueillir, héberger, nourrir, chausser, vêtir, les pourchassés et les volontaires. Autant que faire se peu. Il faut de l’argent pour payer les paysans qui ravitaillent et parfois hébergent, mais aussi pour assurer quelques obligations sociales, donner quelques moyens de subsistance aux familles de ceux qui sont dans la clandestinité ou parfois déjà arrêtés, emprisonnés, déportés, voire fusillés. Il faut des tickets, vrais ou faux, volés si nécessaire, et des bonnes volontés pour les « honorer », c’est à dire les transformer en sucre, café, pâtes, savon, etc., moyennant juste paiement. Il faut trouver ou faire fabriquer des galoches, voire des sabots. Il faut trouver et se procurer, souvent voler dans des réserves officielles, des vêtements civils ou militaires, mais aussi des couvertures car en hiver il ne fait pas chaud dans les cabanes ou maisons isolées. Le « Régional » ne manque pas de bonne volonté mais il est bien démuni.

Curieusement, et c’est là encore une remarque importante, nos jeunes historiens ne parviennent pas à imaginer les problèmes d’intendance, parce qu’il il ne les ont pas connus, parce qu’ils n’ont jamais eu faim et froid

Début 44, François se déplace en « pétrolette » (l’ancêtre des « mobs » de nos petits-enfants, en beaucoup moins bien) et ses proches à vélo, à la force du jarret. Le 8 février il doit emprunter la voiture du commissaire de police pour se rendre au premier parachutage. Le DMR octroie quelques subsides mais ils sont. toujours insuffisants. L’arrivée d’armes aux « lunes » de février, mars, avril, permet d’accueillir chaque fois de nouveaux maquisards et par voie de conséquence créé de nouveaux besoins. C’est le cycle infernal. Il manque toujours de l’argent, des tickets, des chaussures et des vêtements. Il faut aussi organiser dans l’urgence un encadrement, une mini-formation, des services : intendance, renseignement, liaisons, transmissions, sabotages, prévoir des camps-relais, rechercher et faire homologuer de nouveaux terrains de parachutages, transporter des armes. Le maquis c’est l’improvisation permanente. La stratégie se limite souvent à la préparation du lendemain.

Les grandes directives et les savants organigrammes nous font sourire. Peut-être faudrait-il réaliser un manuel d’utilisation des archives, apprendre à distinguer ce qui émane du sommet et ce qu’il en reste au niveau du terrain. La même observation vaut pour l’utilisation des archives de Vichy, de la préfecture, de la gendarmerie, de la police que certains jeunes chercheurs acceptent au premier degré, sans imaginer que ces services étaient souvent noyautés. Dans notre département, que nous croyons assez bien connaître, à partir de la mi-43 le préfet et son Secrétaire général (qui sera arrêté) appartiennent à la Résistance de même que le commissaire de Police et le commissaire aux RG, le capitaine commandant la section de gendarmerie et l’adjudant-chef commandant la brigade de Guéret. Sans oublier la commission de contrôle technique qui « travaille » en étroite liaison avec les facteurs, les agents du tri et le personnel du téléphone. Que valent les conclusions que pourra tirer le chercheur non averti de la compilation des rapports de ces services ?

Pondre des circulaires est une chose. Faire face réalités en est une autre. Quand nous découvrons aujourd’hui certains textes de hauts « responsables », nous avons parfois le sentiment qu’ils étaient sur une autre planète. Nul ne nous a appris les techniques de la guérilla car apparemment nul ne les connaissait. Nous avions des officiers de réserve et quelques officiers d’active. Ils avaient des connaissances militaires, ils savaient faire une certaine forme de guerre (celle qu’ils avaient perdue) mais ils n’étaient pas formés aux combats que nous devions mener. Il a fallu tout apprendre « sur le tas » au gré des initiatives et des combats. A la fin, nous ne savions pas faire une guerre classique mais nous étions devenus opérationnels dans la guérilla. Une technique pas très chevaleresque mais efficace et démoralisante pour un adversaire qui nous traitait en francs-tireurs, fusillait les blessés et déportait les prisonniers. Les stages, nous les avons faits … après la libération.

Les maquisards étaient des volontaires qui risquaient souvent et parfois donnaient leur vie. Pour la libération de leur pays. Ce qui, à défaut de considération, mérite un minimum de décence dans l’appréciation de leurs actes et de respect pour les morts.

Nous avons entendu à Besançon un éminent historien (éminent dans sa spécialité) dire que « les maquis n’ont servi à rien. » Il faut au moins leur reconnaître le mérite de fournir des sujets de communications savantes, de thèses et d’ouvrages tout aussi savants. Ce qui est gratifiant aux yeux des collègues et surtout moins dangereux que d’affronter l’occupant d’alors, les armes à la main. Quand à l’appréciation du rôle des maquis dans la Libération de la France, nous préférons nous en tenir aux faits, opinions et jugements de l’adversaire, c’est à dire aux sources allemandes, lesquelles ne semblent guère inspirer nos éminents historiens. Nous avons le souvenir qu’à Besançon, Eugène Martres, qui connaît le sujet pour sa région, fut interrompu dans des conditions à la limite de la décence.

Nous n’étions donc pas seuls à émettre des réserves vis à vis de « l’histoire savante » qui tend à enfermer la diversité de la Résistance dans un cadre rigide « fabriqué » à posteriori.  A l’issue des communications présentées à Besançon, s’est tenue sous la présidence de Philippe Jautard, une table ronde réunissant d’anciens acteurs : Lucie Aubrac (Libération), Francis Commaerts (chef de réseau SOE), René Fallas (mouvement Lorraine), Jean Gautheron (FTP Jura), Jean–François Munier-Pollet (Service Périclès), Serge Ravanel (Corps-Francs des MUR. La discussion a porté, en partie sur  les rapports entre historiens et acteurs. Ci-après quelques brefs extraits :

« Les malentendus [entre historiens et acteurs] sont difficiles à éviter de par le décalage de formation intellectuelle, la différence d’âge, les conditions de vie passées et actuelles. » (Jean Gautheron)

« Elles [les tensions et oppositions] reposent aussi sur des équivoques de vocabu-laire qui devient parfois du jargon – pardonnez-moi de le dire, amis historiens, – votre vocabulaire est parfois ésotérique. »

« Quand je considère maintenant le situation extrêmement délicate de ceux qui ont débarqué en Normandie, je le dis qu’il était juste de lancer toute la Résistance dans le harcèlement contre les forces allemandes partout en France. » Francis Commaerts

«  La bonne foi des historiens, je la suppose entière. Ils ont fait confiance à des gens qui les ont trompés, non pas actuellement par défaillance de la mémoire, mais qui ont menti dès 1944. »

« Maintenant, les sources sont plus accessibles et la nouvelle génération d’historiens
peut, en moissonnant large, en confrontant, en analysant sources diverses, arriver à un ouvrage où les résistants se reconnaîtront. » Lucie Aubrac.

« Ce qui me préoccupe quand je vois les sujets de certaines thèses, c’est qu’il ne semblent faire l’objet d’aucune coordination. De grands trous demeurent dont on ne semble pas se préoccuper. » Serge Ravanel.


ORGANISATIONS CIVILES ET MILITAIRES DE LA FRANCE LIBRE.

Il en est recensée 36 sur 38 pages. La formule Dictionnaire (alphabétique) aboutit parfois à de curieux découpages. « Nos » FFL de Leclerc, hélas disparus, seraient sans doute fort surpris de voir les unités de leur chef « saucissonnées entre les Forces Françaises libres, la 2èmedivision blindée et le Régiment de marche du Tchad, alors qu’ils se voulaient, dès avant Koufra, le noyau d’un ensemble soudé autour d’un seul et même homme.

- Les services des opérations aériennes aériennes (SOE + BCRA.) déjà évoquées dans un précédent chapitre) ont joué un rôle essentiel car sans armes, il n’y avait pas de Résistance possible. Les deux organisations doivent toutefois être étudiés séparément. Concernant le « Service Action » et spécialement les parachutages, les appellations ont évolué au fil du temps, ce qui n’autorise pas à faire l’impasse sur les hommes, spécialement les radios qui ont payé le plus lourd tribut. En R.5 le responsable COPA Laplace, arrêté, usa de sa pastille de cyanure, deux mois après son retour de Londres. Son successeur, Baron fut lui aussi arrêté mais parvint à s’échapper le la voiture de la Gestapo lors d’un transfert. L’équipe R.5 eut des déportés.

Ce sont ces services, auxquels le Dictionnaire n’attache qu’une importance très relative, qui furent (avec les pilotes des escadrilles spécialisées) les pourvoyeurs en armes de la Résistance.

- Les missions « Jedburgh » Elles étaient comme le prouve leur ordre de mission « détachées auprès des DMR. » Là aussi, la personnalité du chef de mission était très importante. C’est elle qui déterminait ses relations avec le DMR, avec le responsable militaire du secteur et ses rapports avec Londres, sans oublier sa  connaissance ou sa méconnaissance de la Résistance. Les « Jedburgh » étaient en général mieux dotés que les DMR en moyens radio et mieux formés dans le domaine militaire. Ils ont eu chez nous (R.5-D.2), peut-être en fonction de la personnalité de son chef Rewez (Jacques Robert), un rôle plus important, que dans d’autres départements.


TERRITOIRES ET REGIONS. LES TERRITOIRES DE LA RESISTANCE.

Le chapitre comporte 80 pages. C’est beaucoup et bien peu si l’on considère que la Résistance s’organisa en régions, lesquelles, pour la zone sud, correspondaient aux découpages administratifs de Vichy et à celui, des allemands. Nous avons déjà dit ce que nous pensions des nouveaux « charcutiers » qui ont au mépris de la réalité entrepris d’adapter, 60 ans après les faits, les régions de la Résistance aux nouvelles limites administratives. La R.5 se trouve amputée du Cher sud, de l’Indre, de quelques localités du Loir et Cher, d’une partie de l’Indre et Loire, d’une partie de la Vienne et de la Charente et de la quasi-totalité de la Dordogne. Exit donc la R.5. Le Limousin est réduit à ses trois départements d’aujourd’hui. Curieuse conception de l’Histoire !!!

Le texte publié dans le Dictionnaire est de Pascal Plas. Il n’occupe que deux pages et il doit être bien difficile de condenser la Résistance en Limousin sur ce maigre espace. L’auteur connaît bien le sujet et est d’ordinaire mieux inspiré. 7 noms seulement sont cités : Michelet, Guingouin, Rousselier (Rivier), Malraux, Tanguy-Prigent, le résistant allemand Gerhart Léo et le consul de Suisse à Limoges Jean d’Albis. Guingouin est évidemment de personnage principal. André Malraux, sauf erreur ne se manifesta (tardivement) qu’en Dordogne, c’est à dire hors Limousin.) Il aurait participé à la reddition de Brive ? Inexact à notre à connaissance. Tanguy Prigent (6) séjourna un certain temps en Creuse mais il n’était ni Creusois, ni Limousin. Il y fut manifestement très discret. Son rôle dans la Résistance en Creuse, au sens que nous donnons à ce terme, spécialement à l’époque considérée, appelle des réserves. Il était relativement jeune (Né en 1909, comme le chef des FFI)), il se trouvait dans le secteur de la 2ème Cie Franche dont le chef aurait pu lui fournir les moyens de s’affirmer les armes à la main. Par contre il se manifesta au lendemain de la libération dans une voiture ministérielle, encadrée de motards. Quant à Jean D’Albis il fut bien partie à la négociation en vue de la reddition de l’EMP de Limoges mais c’était … fin août 1944.

« Le 7 juin 1944, l’unité de commandement est dans la région 5 sous la direction de Maurice Rousselier, colonel Rivier. Dans l’effervescence générale, certaines formations passent à l’attaque des villes : Guéret le 7 juin, Tulle le 8. Ces premières libérations se déroulent alors que la division blindée SS fait route vers le Limousin où elle doit frapper un grand coup pour venir à bout de la Résistance ; elle reprend Tulle dès le 9 et fait pendre 99 otages et en fait déporter 149. A Guéret les forces allemandes reprennent aussi la ville mais épargnent la population. Un bataillon de la division Das Reich abat cependant 31 maquisards au Poteau de Combeauvert. »

NDLR. Nous avons quelques peines à penser que Pascal Plas ait pu signer ce texte. Il est d’ordinaire précis, avec même une tendance à multiplier les renvois aux sources. Il est évidemment trop jeune pour avoir vécu la période mais il acquit beaucoup de connaissances, en fréquentant les archives et en participant aux multiples colloques traitant de la Résistance, spécialement à celui du 7 juin 2004 à Guéret sur Les villes libérées au moment du débarquement, mais, retenu, il n’était pas le 12 à Tulle pour celui traitant de La libération définitive des villes. Un ou deux appels téléphoniques lui auraient évité de fâcheuses erreurs. Pour mémoire : L’unité de commandement n’était que théorique le 7 juin 1944 et en la matière il ne faut pas oublier le rôle du DMR. L’attaque contre Tulle est du 7 et non du 8. Contrairement à Guéret, où les objectifs avaient été atteints le même jour, en début d’après-midi, par la reddition de la garnison, l’attaque de Tulle ne concerna que les seuls FTP et ne bénéficia pas de l’appui des autres formations. Elle n’était pas terminée le 8 au soir, lors de l’arrivée d’un détachement de la Das Reich. Ce n’est pas par hasard, mais pour des raisons bien précises que Guéret ne subit pas de représailles. Ce n’est pas un bataillon mais seulement une compagnie qui procéda au massacre de Combeauvert. Toute erreur est humaine mais en la circonstance les principales auraient dû être évitées. Question : Qui a proposé ou « imposé » Tanguy Prigent lequel n’était pas Creusois et pourquoi ? Notre plus grand regret : Que Pascal Plas ait accepté de se commettre dans la mutilation de la réalité en acceptant un découpage qui trahit la réalité des faits.


4 – HOMMES ET FEMMES . COMBIEN ETAIENT-ILS ?

Les chercheurs quelque peu avertis savent qu’il a été délivré environ 200 000 cartes de CVR et un peu plus de 50 000 cartes de Combattant au titre de la Résistance, ce qui correspond à un total d’environ 260 000 résistants « officiels. » Il y eut sans doute des résistants authentiques qui ne demandèrent rien et ne furent en conséquence pas « reconnus » et des résistants « officiels » aux mérites quelques peu limités qui le furent. Les responsables du Dictionnaire ont admis, dans une conception plus large, un chiffre global de 500 000 Résistants mais ont limité à 235 le nombre de ceux méritant une notice biographique. Pourquoi 235 seulement ? Pourquoi pas 500 ? ou 1 000 ? Pour limiter la pagination ? C’est un choix éditorial qui sera sans doute source de bien des déceptions et frustrations. Par ailleurs, ce qu’ils ont fait après la libération, ce qu’ils sont devenus et les fonctions qu’ils ont pu occuper ne devaient pas être pris en compte pour leurs mérites résistants.

Sur ces 235 aucun Creusois mais deux personnalités qui y avaient des attaches : Marc Bloch et Pierre Bourdan, et une troisième qui y trouva une mort brutale : Jacques Chapou (Kléber.) La notice concernant Marc Bloch a été rédigée par Jean-Marie Guillon (Faculté d’Aix-Marseille) et justifie une appréciation positive. Celle consacrée à Pierre Bourdan est due à Aurélie Luneau, (Docteur en histoire, sans autre précision.) Elle cite trois sources dont évidemment Ici-Londres, mais elle doit être trop jeune pour avoir écouté Pierre Bourdan sur les ondes de la BBC. La notice consacrée à Chapou-Kléber est de Pierre Laborie qui connaît bien le Lot dont est originaire Chapou. L’historien s’est intéressé aux événements de Tulle et aux conditions de la mort tragique de Kléber, le 16 juillet, à Bourganeuf. Appréciation positive.

Suggérer en complément, le nom d’un responsable creusois, nous ferait taxer de chauvinisme. Jacques Robert (Cdt Rewez), Compagnon de la Libération, chef de la mission interalliée Bergamote parachutée en Creuse et dont les activités antérieures sont bien connues aurait à nos yeux mérité une place. On aurait de même pu penser à Paul Rivière, lui aussi Compagnon, (qui ne fit que deux brefs passages en Creuse) mais joua un rôle essentiel dans l’organisation des actions aériennes (parachutages) pour R1 puis pour toute la zone sud et aux proches de Jean Moulin que furent Paul Schmidt (Kim), Fassin et Montjarret. Tous sont cités dans le chapitre traitant de leurs activités (Réseaux pour Rewez) opérations aériennes (Service Action) pour les autres et leurs noms figurent dans l’index. De nombreux résistants auraient sans doute aussi aimé trouver mention du Colonel (britannique) Vérity qui commanda l’escadrille des Lysanders et participa à de nombreuses missions.

Le Limousin, hors Creuse, n’est pas mieux considéré. Seul, Georges Guingouin a fait l’objet d’une notice, rédigée là encore par Pierre Laborie, qui connaît bien le sujet. Il utilise le conditionnel pour évoquer le retard pris par la division Das Reich dans sa marche vers le front de Normandie. Retard bien réel dans lequel Guingouin eut sa part mais il faut, semble-t-il, associer toute la Résistance en R.5.

Il est toujours difficile, dans ce type de sujet, de faire un choix. Il nous semble cependant que les « politiques » et d’une manière plus générale celles et ceux qui ont ultérieurement, à des titres divers, plus ou moins occupé le devant de la scène, ont plus attiré l’attention des rédacteurs du Dictionnaire que les modestes. Simple illustration, concernant la R.5 : André Malraux. L’index fait mention de 19 citations, ce qui ne ressort pas de la courageuse notice biographique que Pierre Laborie consacre à ses activités résistantes.

La liste des DMR se trouve reléguée en « annexe », sans commentaires. Peut-être eut-il été souhaitable de préciser que plusieurs sont morts en mission, tels nos voisins de R.6 (Courson) et B (Bonnier.) On peut aussi s’étonner de ne pas trouver, au moins sous forme de liste ou de cartes, les noms des chefs départementaux et régionaux des FFI au 6 juin 1944 avec, le cas échéant, les noms de ceux qui les ont précédés dans la fonction mais ont été fusillés ou déportés.

Notes

(1) Université de Franche Comté. Besançon.
(2) Directeur historique de la Fondation de la Résistance.
(3) Directrice du Mémorial du Maréchal Leclerc et du Musée Jean Moulin
(4) Robert Laffont. Collection « Bouquin ». 2006
(5) Voir  Jean-Pierre Azéma. De Munich à la Libération. Seuil.
(6) Dans la notice biographique que lui consacre Christian Bougeard, historien respecté de la Bretagne, Tanguy Prigent, ancien député socialiste ayant voté contre les pleins pouvoirs à Pétain, se voit attribuer de multiples activités contre Vichy et spécialement, la Corporation paysanne. Il aurait été un des fondateurs de Libération-Nord en Bretagne ce qui est dans la logique de cette formation. Il en serait devenu le chef en mai 44, (donc après son séjour en Creuse) et participé aux combats de juillet-août [après la percée d’Avranches} dans la région de Morlaix. Nommé ministre de l’agriculture en septembre. Il avait eu 30 ans en 1939. Ces faits n’altèrent pas notre opinion. Il n’avait pas à être mentionné parmi les personnalités de la Résistance en Limousin.