Il est dommage que la conférence de Christophe Moreigne qui eut lieu à
Éguzon, le 18 octobre 2019, juste à la limite de la Creuse et de
l'Indre, se soit déroulée face à un public peu nombreux, mais de
qualité, comme il est de coutume de le dire en de telles circonstances,
mais une chose est certaine : les absents auront manqué une remarquable
prestation de la part de notre historien, spécialiste de l'histoire de
la Deuxième Guerre mondiale en Creuse.
Pour dire l'exacte vérité, ce ne fut pas à proprement parler une
conférence, disons que Christophe Moreigne a innové en se livrant à ce
que nous pourrions appeler, faute de mieux, un débat thématique autour
de la question de l'accueil des réfugiés, des persécutés. Pourquoi en
fut-il ainsi ? Tout simplement, parce que, dès la présentation au
public de Christophe Moreigne par le président de l'association
éguzonnaise, les questions fusèrent. C'est alors que notre historien
guérétois décida de ne plus suivre le plan prévu de son intervention,
mais invita le public à être interactif, donc à intervenir en posant
des questions ou en faisant des commentaires, et ce juste, après une
courte introduction dans laquelle Christophe Moreigne traça son
parcours d'historien et exposa l'ensemble de ses recherches, expliquant
pourquoi il s'intéressait plus particulièrement à tel ou tel sujet.
Ses premiers travaux d'historien ne concernaient pas l'histoire de la
France des années noires, mais la Révolution française. Puis
progressivement, il s'est intéressé à l'accueil des réfugiés espagnols,
puis des juifs, et également, plus surprenant peut-être, à la façon
dont les prisonniers de guerre allemands, après la défaite de
l'Allemagne hitlérienne, furent plus ou moins acceptés dans le
département de la Creuse.
La prestation de Christophe Moreigne, sous cette forme un peu
particulière, dura quand même près de deux heures et demie, car il
fallait bien aussi mettre fin à ce débat passionnant et captivant. Le
public aura été impressionné par l'érudition, par le calme olympien,
par le sens de la pédagogie de Christophe Moreigne. Néanmoins, force
est de reconnaître que beaucoup des questions posées par le public
étaient biaisées, car inéluctablement il était demandé à Christophe
Moreigne de faire des comparaisons avec la situation présente que nous
connaissons en Europe avec l'accueil des migrants. Pourtant dès le
début, Christophe Moreigne n'eut de cesse de rappeler au public que le
péché mortel de tout historien est l'anachronisme. Malgré ce filet de
sécurité, il fut quasiment impossible à notre historien d'éviter des
rapprochements avec toutes les polémiques qui encombrent l'actualité,
le feu roulant des questions obligeait même Christophe Moreigne à
parfois sortir du cadre fixé par
Clio
pour se rapprocher de celui de
Diké,
et donc de porter des jugements moraux, même si l'historien creusois ne
voulait, d'abord et avant tout, que dresser la liste des faits en
s'appuyant sur une chronologie très précise pour montrer pourquoi et
comment dès le début du gouvernement de Vichy les persécutions se
mirent en place.
Tout le long de son intervention, Christophe Moreigne développa deux
thèmes majeurs :
1. La Creuse est une terre d'accueil, la population de ce département
s'est toujours admirablement bien conduite à l'égard des réfugiés et
autres persécutés, même si bien sûr il y eut des comportements indignes
de la part de certains ;
2. Justement, à ce propos Christope Moreigne argumenta en expliquant
qu'il était arrivé, au fil de ses recherches personnelles, à la
conclusion que dans tout groupe humain vous avez toujours 5 % de
personnes au comportement ignoble, dit autrement de gens peu
scrupuleux, calomniateurs, dénonciateurs, délateurs zélés, etc.
En conclusion de ce bref compte rendu, souhaitons que Christophe
Moreigne puisse réitérer en Creuse ce type de soirée de débat
thématique.