lesartisansdelapaix.jpgDifficile de dissocier les deux guerres mondiales qui ont tragiquement marqué le XXe siècle.
Le Traité de Versailles fut-il un diktat pour les Allemands ? Et que dire des autres peuples ?
Car les « artisans de la paix » avaient des objectifs inconciliables.
Le livre de Margaret MACMILLAN est devenu un ouvrage de référence ; impossible de comprendre les années 1920, 1930 sur le plan des relations internationales si l’on ne fait pas l’effort de suivre ce que furent les conditions des négociations du traité de paix qui devait mettre fin à toutes les guerres.
Un court extrait, mais ce livre est tellement riche qu’il serait nécessaire de citer des pages et des pages.
« [p. 619] Dans les cabarets berlinois on plaisantait sur un ouvrier qui, dérobant des pièces détachées d’un landau de bébé, découvrait en les assemblant qu’il venait de fabriquer une mitrailleuse. Un peu partout en Europe, dans les pays neutres comme la Hollande et la Suède, des sociétés dont la propriété était allemande en dernière analyse travaillaient à la construction de tanks et de sous-marins. L’endroit le plus sûr, le plus à l’abri de la curiosité des membres de la commission de contrôle, c’était l’Union soviétique : en 1921 ces deux pays parias découvrirent qu’ils pouvaient se rendre de mutuels services. En échange de l’espace et du secret qui entourerait ses expériences sur les tanks, les avions et les gaz asphyxiants, l’Allemagne offrit aux Soviétiques une assistance technique et la formation de spécialistes.
Quand les historiens se penchent sur les détails, comme ils le font de plus en plus, il apparaît que le tableau d’une Allemagne écrasée par une paix rancunière et injuste est indéfendable. L’Allemagne perdit en effet des territoires, c’était une conséquence inévitable du fait qu’elle avait perdu la guerre. Si elle l’avait gagnée, on doit se souvenir qu’elle aurait à coup sûr saisi la Belgique, le Luxembourg, une partie du nord de la France et une fraction substantielle de la Hollande. Le traité de Brest-Litovsk, d’autre part, révélait quelles étaient les intentions du haut commandement allemand à propos des frontières orientales. Malgré ses pertes, l’Allemagne demeura, pendant 1’entre-deux-guerres, le plus grand pays de l’Europe à l’ouest de l’Union soviétique. Sa position stratégique s’était améliorée significativement par rapport à l’avant-guerre. Avec la renaissance de la Pologne, une barrière se dressait maintenant contre la vieille menace d’une invasion russe. À la place de l’Autriche-Hongrie, l’Allemagne n’avait plus sur sa frontière orientale que des États faibles qui se disputaient entre eux. Comme le montra la décennie 1930, l’Allemagne était bien placée pour leur imposer sa puissance économique.
Certes la séparation de la Prusse orientale du reste du pays était une source d’irritation, mais cette séparation n’avait rien d’une innovation dans l’histoire de la Prusse, laquelle au cours d’une grande partie de son existence s’était trouvée formée de portions de territoires discontinues. D’ailleurs de telles séparations doivent-elles nécessairement provoquer des difficultés ? L’Alaska est séparée du reste des États-Unis par un gros morceau du Canada. À quand remonte la dernière crise entre Washington et Ottawa à propos des droits de passage ? »