Le chagrin et le pardon [Texte imprimé] : journaux et mémoires de prisonniers de guerre allemands en France : 1945-1948 / Hellmut Frauenlob, Rudolf Hagemann ; traduction, Annie Palanché, Alain Giévis, Klaus Korte... - Éguzon (la Mairie, 2 rue de la Gare, 36270 ) : Points d'Aencrage ; Châteauroux (15 rue de la République, 36000 ) : CREDI éd., DL 2006 (33-Bordeaux : Impr. La Nef-Chastrusse). - 1 vol. (133-137 p.) : ill., couv. ill. ; 24 cm.

Ce livre publié sous la direction de l’historien Alain Giévis, comporte une partie en français et une deuxième similaire en langue allemande. Il nous permet de découvrir l’histoire inconnue du grand public, voire entièrement occultée tant en France qu’en Allemagne, de deux très jeunes prisonniers, Hellmut Frauenlob et Rudolf Hagemann, dont le parcours est représentatif de celui des centaines de milliers de P.G. de l’Axe détenus par notre pays dans l’immédiat après-guerre. Il réunit le témoignage exceptionnel de deux gamins en Normandie de 1945 à 1948. Cet ouvrage contribue à l’élaboration d’une mémoire commune franco-allemande, fédérant avec une puissance marquante ce qu’il y a d’universel et de tragique dans la condition de prisonnier de guerre : souffrances physiques et morales, cruauté de la condition de vaincu dans les camps ou commandos. Ce livre a le mérite de mettre en évidence grâce à l’archive privée le côté sombre que peut revêtir sans s’en rendre compte tout vainqueur, la déshumanisation du prisonnier et donc le froid mécanisme collectif de la chute (au sens biblique) qui prend corps et s’insinue au sein de la « puissance détentrice ». J’ai eu la chance de rencontrer Hellmut à Châteauroux au printemps 2006. Il s’agit d’un homme plein de retenue et de pudeur, ancien directeur de collège, marqué par le poids de la solitude, du désespoir vécu adolescent face à la mort et à l’absence de tout être cher. Le passage du document qui relate la découverte par le jeune ouvrier agricole d’un squelette dans un champ de son patron, est un des centres de gravité de l’ouvrage. Ainsi, il écrit dans son journal à la date du 25 décembre 1946 : « Un dimanche, je suis sorti avec la bêche et une croix. Un vent vif, froid d’humidité, balayait le champ. J’avais mal aux mains tellement il faisait froid. A l’endroit où il était tombé et avait été enterré, j’ai érigé un tertre. A la tête, j’ai posé la simple croix de bois avec l’inscription : soldat inconnu  allemand. J’ai mis un casque d’acier sur la croix. Après, j’ai planté aussi du lierre sur le tertre dénudé et je l’ai fait s’entortiller et grimper à la croix de bois. Je dois dire qu’après avoir accompli ce travail je me suis senti mieux. Maintenant ce soldat a enfin trouvé le repos mérité. »

Christophe Moreigne

Journaux et mémoires de prisonniers de guerre allemands en France, Éguzon, Points d’Æncrage, 2006, 269 p. 22 €.
Il est possible de commander ce livre en téléphonant à la mairie d’Éguzon et en demandant le secrétariat de l’Aspharesd, association qui s’occupe des éditions Points d’Æncrage.

Le chagrin et le pardon
Aspharesd — éditions Points d’Æncrage
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